17 décembre 2019 - Écrit par Julien Auduc

L’entrée en établissement : un cap psychologique

Emménager dans une maison de retraite est une étape souvent douloureuse, pour le nouveau résident comme pour ses proches. Il s’agit le plus souvent d’une décision prise face à une situation d’urgence quand elle n'est pas anticipée. Pour faciliter l’adaptation à ce nouvel environnement, de nombreux progrès ont été faits. Pour autant, le choix de l’établissement doit être soigneusement réfléchi.

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Ouvrir les établissements sur la ville permet de sortir les résidents de leur quotidien. Crédit : Fotolia.

77 % des Français de plus de 70 ans vivant en maison de retraite se disent heureux, et 93% se sentent bien entourés. Aujourd’hui, le bien-être est entré dans ces établissements qui, ne l’oublions pas, sont dédiés à des personnes nécessitant beaucoup de soins. Et c’est là tout le paradoxe.

Une entrée souvent difficile à anticiper

« L’arrivée en résidence se fait souvent à la suite d’un incident nécessitant un suivi médical empêchant le maintien à domicile : chute, accident cardiaque ou cérébral… continue le docteur Ponche. Cette décision se fait donc de manière contrainte, et elle peut être violente. Il est donc difficile de bien s'y préparer. » Pour autant, un important travail d’intégration a été mis en place pour adoucir le plus possible ce passage. La consultation pré-admission permet ainsi aux familles (et éventuellement au résident ) de rencontrer le personnel médical et administratif. «C‘est un moment primordial où l’on rassure tous les protagonistes et où on ébauche le projet de vie du nouvel arrivant, explique Valérie Lagrevol, directrice adjointe de cet établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). On rencontre souvent des personnes âgées hésitantes et des proches qui culpabilisent. À nous de bien identifier les besoins. On ne contraint pas nos aînés à nous rejoindre. Il faut que tout le monde soit d’accord sur ce qui l’attend.» Pour ces professionnels, le premier mois reste primordial. Pour le résident, c’est la découverte d’un nouvel environnement et le moment de son appropriation. Et dans ce domaine aussi, des progrès ont été faits.
 

Rencontre avec Mauricette Faucher

« Je me sens vraiment chez moi »

mauricette-1.jpg« Des problèmes de santé ont fait que je ne pouvais plus rester seule chez moi, mon mari étant décédé depuis déjà plusieurs années. Ma fille souhaitait que j’aille habiter chez elle, mais je ne voulais pas être un fardeau. Nous avons donc décidé que j’irais en maison de retraite. Je crois que c’est plus difficile pour mes proches que pour moi. J’ai pu visiter les lieux avant, rencontrer le personnel, et tout le monde m’a paru très sympathique.

Aujourd’hui, je m’y plais beaucoup. Je n’ai plus peur d’avoir des malaises et ma fille et mes petits-enfants me rendent régulièrement visite. Je ne regrette pas mon choix. J’ai une grande chambre dans laquelle j’ai mis mes meubles. Je me sens vraiment chez moi. C’est mon appartement.

Bien que solitaire, j’aide parfois ma voisine de 101 ans. Cette promiscuité et la dépendance de certains résidents n’ont pas été évidentes au début mais, finalement, je m’y suis très bien adaptée. Pendant les vacances, je suis allée chez ma fille garder mes petits-enfants. Et c’est vrai qu’au bout d’un mois, j’avais vraiment hâte de rentrer.»

Ehpad, soins de suite, résidence… comment s’y retrouver ?

Les établissements pour personnes âgées peuvent être classés en trois catégories

Les maisons de retraite médicalisées (Ehpad) constituent la majorité des structures d’accueil. Il en existe actuellement 6 850. Ce sont des sites médicalisés qui disposent 24 heures sur 24 d’une équipe soignante chargée d’assurer les soins. Les résidents bénéficient d’un espace privatif, d’une chambre et de prestations collectives (restauration, entretien du linge…).


Les hébergements pour personnes âgées autonomes sont divers. Les maisons d’accueil rurales pour personnes âgées (Marpa) proposent des logements à usage privatif et des espaces de vie collectifs. Cela permet aux personnes âgées issues d’un milieu rural de continuer à vivre dans leur environnement familier. On en compte 130 en France. Les logements foyers accueillent des seniors autonomes dans des studios ou des deux-pièces. Les bénéficiaires conservent ainsi leur indépendance tout en bénéficiant de services collectifs. Enfin, dans les résidences avec services, les personnes âgées peuvent être propriétaires ou locataires de leur appartement. Il s’agit de résidences commerciales, qui offrent des prestations de luxe. Elles sont généralement peu, voire pas du tout médicalisées.


Les services hospitaliers s’adressent aux personnes dont l’état de santé est fortement dégradé. Les unités mobiles de gériatrie se déplacent au sein de l’hôpital ou dans un autre établissement médico-social pour aider à la prise en charge des patients. Ces unités peuvent parfois intervenir à domicile ou dans une maison de retraite. Les soins de suite et de réadaptation (SSR) ont pour mission la rééducation, la réadaptation et la réinsertion des patients après une hospitalisation de courte durée. Ce sont des structures de moyen séjour. Les unités de soins de longue durée (USLD) accueillent des personnes dont l’état nécessite une surveillance médicale constante : importante perte d’autonomie (impossibilité de se laver, de se lever, de s’habiller et de se nourrir seul) et besoin de soins médico-techniques continus sur une longue période. La moyenne de la durée de séjour y est d’un an et demi.

Un lieu de vie à intégrer

77 % des Français de plus de 70 ans vivant en maison de retraite se disent heureux, et 93% se sentent bien entourés (1). Aujourd’hui, le bien-être est entré dans ces établissements qui, ne l’oublions pas, sont dédiés à des personnes nécessitant beaucoup de soins. Et c’est là tout le paradoxe. «C’est vrai que beaucoup d’efforts ont été faits pour améliorer la vie des résidents, que ce soit au niveau de l’accompagnement, du cadre de vie ou des activités, explique Anne-Marie Ponche, médecin coordinateur d'une résidence de Pontault-Combault (Seine-et-Marne). Les structures n’ont rien à voir avec la mauvaise image que pouvaient avoir les hospices d’autrefois. Mais attention, ce ne sont pas non plus des centres de vacances. Nous sommes un endroit médicalisé où, malheureusement, on meurt.» Cet emménagement que beaucoup craignent arrive aussi de plus en plus tard. Il y a vingt-cinq ans, l’âge moyen d’entrée en maison de retraite était de 80,2 ans. Aujourd’hui, il est de 85,06 ans. Et les femmes y sont toujours majoritaires.

Impliquer les familles

D’où l’importance des activités qui rythment aujourd’hui le quotidien de ces structures. «L’idée, c’est vraiment d’ouvrir les établissements sur la ville en sortant les résidents de leur ordinaire et en essayant d’impliquer les familles, affirme Valérie Lagrevol. Chez nous, les idées sont nombreuses et on ne cesse de se renouveler.» Des ateliers de zoothérapie ont ainsi été organisés. Cette thérapie utilise la proximité d’un animal pour réduire le stress chez les personnes âgées, dépendantes ou atteintes de la maladie d’Alzheimer. Une activité avec des poneys a par exemple été mise en place. Dans les espaces extérieurs, des jardins partagés ont été installés. Les résidents et leur famille, les salariés de l’Ehpad et les habitants du quartier s’occupent ensemble de ces parcelles dans un esprit intergénérationnel. « Nous avons aussi noué des partenariats avec d’autres établissements du département, ajoute la directrice adjointe. Nous organisons des activités communes et des olympiades. Nous avons également accueilli dans nos locaux des associations de la commune qui font du yoga et de la danse.» Autant d’éléments qui permettent d’apaiser les résidents et de rassurer les familles. Pour autant, le sujet reste difficile à évoquer. La décision d’entrer en établissement spécialisé doit pourtant être discutée, notamment pour trouver la structure la plus adaptée. C’est un préalable indispensable à un séjour réussi.

 

 

 

 

Beaucoup d’efforts ont été faits pour
améliorer la vie des résidents, que
ce soit au niveau de l’accompagnement,
du cadre de vie ou des activités.

(1) Sondage réalisé par l'Observatoire de l'âge en 2014

7 conseils pour s’installer en maison de retraite

1. Bien choisir son établissement
Privilégier un emplacement géographique qui limite l’isolement, proche de la famille ou des amis. Vérifier qu’il correspond bien à ses besoins.


2. Faire une visite avant l’installation
Rester positif pour réduire le stress.


3. Faire ses comptes
Les tarifs des maisons de retraite se calculent en fonction de trois éléments distincts et complémentaires : l’hébergement à la charge de la personne âgée, la dépendance estimée en fonction de l’autonomie du résident et en partie compensée par l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA), et les soins financés par la Sécurité sociale. Selon l’inspection générale des Affaires sociales, les tarifs à la charge du résident sont en moyenne de 2 171 € par mois.


4. Se renseigner sur les aides
L’État et les départements peuvent intervenir pour réduire la note… Il faut se renseigner.


5. Penser aux objets personnels utiles
Cela peut aller des meubles aux photos de famille en passant par des livres et tout ce qui peut permettre de se sentir chez soi. Certains établissements acceptent les animaux domestiques.


6. Favoriser l’entente et la participation familiale
Qu’il s’agisse de coups de pouce financiers ou de simples visites.


7. Prendre part à la vie de l’établissement
Profiter des activités de groupe, des sorties et des animations.